Eyeka, qui fête ses 4 ans, vient d’ annoncer une levée de fonds de 3 millions d’euros à laquelle ont souscrit les investisseurs historiques: Ventech, DN Capital, et SFR Developpement, ainsi qu’I-Source Gestion, observateur affuté et acteur sur les Technologies de l’Information et de la Communication.
Après quelques évolutions de la stratégie, le positionnement d’Eyeka en place aujourd’hui, que j’avais imaginé en 2005, a permis de valider les options de développement et de rassurer les investisseurs sur ce nouveau tour de table. François Petavy, son CEO, explique la mission d’Eyeka
mettre en relation des marques et des agences avec une communauté de 75,000 consommateurs créatifs qui créent des contenus sur la base de brief.
En tant que co-fondateur et actionnaire, je suis évidemment très heureux de cette levée de fonds et voudrais partager avec vous quelques points liés à la compétitivité d’Eyeka, à son potentiel sur le marché du marketing sur internet et l’histoire de sa création.
Rappel historique des levées Eyeka
Pour mémoire, plus de 8 millions d’euros ont été investis depuis l’origine. Voici les montants, les investisseurs et les objectifs assignés:
- Janvier 2006: création d’Eyeka, 4 millions d’euros: Ventech et DN Capital, focus équipe et technologie
- Mai 2007: augmentation de capital : SFR Développement, focus technologie et ouverture de la filiale Asie
- Décembre 2009: 3 millions d’euros: investisseurs historiques + i-Source; accélération du développement international
L’objectif de ce 3eme tour: monter en puissance à l’international
Ce troisième tour permettra donc de renforcer le développement à l’international, en particulier dans les pays anglo-saxons qui sont les leaders historiques du marché de la communication. De mon point de vue, et sur les plans de sa croissance et de son attractivité tant pour les clients que pour des investisseurs, la prise de position sur le marché américain est fondamentale. Comme le dit François Petavy, CEO, l’objectif est:
principalement et surtout grandir à l’international. On est depuis près de deux ans à Singapour et notre filiale là-bas est déjà rentable ; on est en train d’ouvrir une autre filiale à Londres et on va regarder d’autres pays.
L’origine d’Eyeka: la révolution numérique en automne 2004
J’ai eu l’idée d’Eyeka fin 2004, lors de Visa pour L’image, le plus gros évènement mondial dans le photo-journalisme, en observant les craintes des photographes professionnels face à l’émergence des photographes amateurs et la banalisation de la distribution de l’image. Alors que je dirigeais Corbis en France et en Europe, l’agence d’image de Bill Gates, j’avais observé plusieurs points :
- Le numérique était désormais totalement fiable. En 2001, tous les photographes de news de Corbis étaient passés de l’argentique au numérique en quelques mois.
- le marché le plus rémunérateur était celui du contenu publicitaire. Chez Eyeka, j’ai voulu rester volontairement à l’écart de “l’actualité”.
- nous produisions pour des annonceurs que je connaissais bien en raison de mes 11 années passées dans la publicité. Ces marques étaient de plus en plus demandeuses de nouveaux modes d’expression.
- Un grand nombre de jeunes photographes souhaitaient distribuer leurs images de façon professionnelle. Chez Corbis, en 2002, nous avions financé plusieurs jeunes collectifs de photographes. Certains existent aujourd’hui encore.
Le Tsunami et la rencontre avec Gilles Babinet
Le 26 décembre 2004, le Tsunami frappe et les premières images qui sortent dans les médias sont celles d’amateurs, en video. Le marché allait s’ouvrir à la faveur de la révolution numérique dans les technologies et les usages. A l’occasion d’une rencontre avec Gilles Babinet, nous avons entrepris, en février 2005, d’élaborer le Business Plan, de monter l’entreprise et de faire la tournée des VC dans la Valley (cf photo). Pour mémoire, les plateformes vidéo n’existaient pas à l’époque: YouTube a été crée en février 2005 et DailyMotion en mars 2005 sur un modèle de partage, pas de création de contenu.
Deux spécificités d’Eyeka: les appels à création et la rémunération des auteurs producteurs?
Chez Corbis, l’absence de pré-commandes des clients, les “assignments”, affectait fortement les résultats financiers de l’agence. Nous produisions en “spéculation”, c’est à dire que nous prenions le risque de la production sans être certain des ventes. Quand j’ai imaginé Eyeka, je me suis attaché à faire de cette faiblesse une force. Le modèle des “appels à création” sur Eyeka permettait de mettre en ligne des briefs de marques et des commandes pré-payées, auxquels répondent des nouveaux talents, photographes et videastes.
Concernant les nouveaux talents, il fallait s’assurer que les photographes et vidéastes d’Eyeka puissent être rémunérés si leurs images étaient vendues. Le préalable étaient qu’ils soient titulaires des droits de leurs images. Nous avons donc mis au point un contrat d’auteur que tous signeraient, attestant ainsi de la titularité des droits de leurs photos et vidéos. Le second salarié d’Eyeka, après son CTO, a d’ailleurs été un juriste. Cette singularité est aujourd’hui une force.
Eyeka: proof of concept
Des 2007, nous avons lancé les premiers appels à création sur Eyeka. Quelques clients nous ont suivi comme Canon, Ville de Paris, Orange NeXt pour Soundtribes, Macif et d’autres par la suite. Nous avons aussi déporté le modèle en marque blanche sur Paris Match, Canal+ SFR Jeunes Talents et Numéricable. Les résultats économiques validaient le positionnement.
Que veut dire la marque “Eyeka”?
Nous pouvons tous partager les histoires et les regards que nous portons sur le monde, ses évènements, ses acteurs, qu’ils nous soient privés ou publics. La marque devait le plus possible porter cette conviction et cette vision. Avec des dictionnaires et une connexion internet, j’ai crée la marque Eyeka: Eye “l’oeil” et “Ka” l’âme en Egyptien ancien: “l’âme de l’oeil” ou “Vous êtes ce que vous voyez”.
Pourquoi Eyeka s’intègre bien dans l’éco-système
La mutation profonde de l’univers des médias vers de nouveaux modes de consommations, de nouveaux usages, une nouvelle communication publicitaire plus engagée et communautaire sont inexorables. Quatre tendances fondamentales sont favorables à Eyeka :
- la forme actuelle de la publicité ne convient plus toujours. 14%, c’est l’ indice de confiance des Français dans la publicité TV
- les formats de création de contenu issus de l’internet correspondent davantage à son mode de consommation. Internet est le premier média en Europe en 2010 et 3ème support publicitaire mondial.
- le besoin d’authenticité et d’engagement dans les discours des marques est bien réel et favorise l’émergence du brand content et du transmedia.
- l’emergence du marketing communautaire fait appel aux témoignages des consommateurs.
Voilà en quelques mots pourquoi j’y crois. Félicitations à l’équipe de management pour ce 3ème tour et que les vents des nouveaux médias gonflent les voiles d’Eyeka chez nos amis anglo-saxons.